Interdiction d'une teinture

La vente d'une teinture pour les cheveux de bon marché a été interdite
dans le nord de l'Inde afin d'empêcher les paysans surendettés de la
boire pour se suicider, a-t-on appris aujourd'hui auprès d'un haut
responsable local. Plusieurs milliers d'agriculteurs sont acculés à la
dernière extrémité chaque année.
Au moins onze se sont donné la mort ces trois derniers mois
dans l'État de l'Uttar Pradesh frappé par la sécheresse, selon Rajiv
Agarwal. Du coup, «nous avons interdit la vente de la teinture bon
marché fabriquée dans l'Uttar Pradesh», a-t-il dit.
L'absorption de la teinture pour les cheveux entraîne la
défaillance des reins, explique Ganesh Kumar, à l'université médicale
de Maharani Lakshmi Bai.
Les deux tiers des 1,1 milliard d'Indiens dépendent de
l'agriculture, et la plupart sont laissés pour compte par le boom
économique du pays: le pays table sur une croissance économique
nationale de 8,7% cette année, mais l'agriculture devra se contenter de
2,6%. En outre, le cours du coton a dégringolé ces dernières années
tandis que le gouvernement supprimait des aides dans le cadre de la
libéralisation économique entamée en 1991.
Dans certaines régions de l'ouest et du sud de l'Inde, la
situation économique est apparemment à l'origine de milliers de
suicides de paysans ces dernières années.
Fin mai 2007, l'organisation militante Vidarbha Jan Andolan
Samiti («Mouvement populaire») faisait état du suicide d'au moins onze
paysans surendettés en deux jours dans sept zones de culture du coton
de l'État occidental de Maharashtra, coeur économique de l'Inde dont la
capitale est Mumbai (anciennement Bombay). Trois de ces agriculteurs se
seraient pendus, les autres auraient avalé du pesticide.
La sécheresse due et l'absence de pluies de mousson frappent
ainsi depuis quatre ans la région de Bundelkhand, située à quelque
300km au sud-ouest de Lucknow, capitale de l'Uttar Pradesh. «Les terres
agricoles sont devenues arides. Un exode a commencé: les jeunes migrent
vers les villes voisines, laissant derrière les femmes et les personnes
âgées, affirme Rajiv Agarwal.
Le mois dernier, le gouvernement fédéral a annoncé qu'il
annulerait les dettes dues avant ou en date du 31 décembre 2007 pour
les plus pauvres des petits paysans dont les terres ne dépassent pas
les deux hectares. Cela devrait concerner environ quatre millions
d'agriculteurs. En outre, des millions d'Indiens seront exonérés
d'impôts grâce au relèvement du seuil d'imposition, dans le cadre du
budget qui pourrait être le dernier de l'exécutif actuel avant les
élections. Celles-ci, prévues au plus tard pour mai 2009, pourraient
avoir lieu dès cette année.
Les petits paysans empruntent souvent auprès des banques ou de
prêteurs privés, des usuriers, afin d'acheter les semences et de faire
face aux dépenses ordinaires de la famille. Et certains, ne pouvant
rembourser leurs dettes faute de bonnes récoltes, se suicident.