Yahoo!, une des marques phares d'Internet, serait-elle en train de perdre pied ? C'est en tout cas le sentiment que fait naître l'annonce, mardi soir 5 décembre, par la direction du groupe, d'une vaste réorganisation générale de son fonctionnement et de sa direction.
Le but annoncé par le géant de la recherche sur Internet vise à dynamiser sa croissance, et surtout à combattre son rival, Google, sur des terrains comme la publicité, un des gros points faibles de Yahoo!. A cette fin, Dan Rosensweig, directeur général de la société, quittera ses fonctions en mars 2007. La restructuration passera également par une réorganisation en trois pôles, un consacré aux outils "clients" (communication, communautés, médias, moteur de recherche), le deuxième axé sur la publicité et dirigé par Susan Decker (actuelle directrice financière), et le dernier consacré au développement technologique du groupe.
Cette réorganisation, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2007, devrait être achevée fin mars 2007. Elle doit permettre, selon son PDG, Terry Semel, d'"accélérer la prise de décision". Il y a quelques semaines, un document interne de quatre pages intitulé "Manifeste du beurre de cacahuète" – diffusé sans accord à la presse – faisait état, selon Brad Garlinghouse, vice-président directeur de Yahoo!, d'une stratégie trop dispersée et bureaucratique. Il incitait les plus hauts cadres dirigeants à porter leurs efforts sur des priorités judicieusement choisies plutôt qu'étaler largement et insuffisamment les ressources, comme du beurre de cacahuète sur une tartine : "Ce faisant, nous ne nous concentrons sur rien en particulier", énonçait notamment l'auteur du mémo, et de conclure par un appel à recentrage et une refonte de l'encadrement du portail Internet leader aux Etat-Unis.
PLUS "SUIVISTE" QU'INNOVANT
Yahoo! est actuellement le portail le plus visité outre-Atlantique, et étend son empire de la messagerie électronique au recrutement professionnel en ligne, en passant par les recettes de cuisine ou les systèmes communautaires de questions/réponses notamment. Le groupe réagit cependant à l'inexorable ascension de Google, concrétisée récemment par l'achat de YouTube, le site gratuit d'échange de vidéos. Google, qui réalisera 4 milliards de dollars de recettes publicitaires en 2006 aux Etats-Unis, devance largement Yahoo! et ses 2,9 milliards de dollars (hors coût d'acquisition de trafic) selon une étude de l'institut eMarketer, qui donnait les deux géants à égalité en 2005.
Yahoo! serait, selon les experts du secteur, plus "suiviste" qu'innovant, se contentant de reproduire et copier les applications et services qui fonctionnent ailleurs, au lieu de se concentrer sur les quelques secteurs porteurs que sont par exemple les blogs ou la messagerie instantanée. Pour sa défense, le groupe a rappelé les initiatives récentes destinées à enrayer ce flottement, avec notamment la mise en place d'une nouvelle plate-forme de distribution publicitaire (Panama), un partenariat publicitaire sur téléphones portables avec Vodafone,le lancement d'un outil de gestion publicitaire pour l'Internet nomade, le rachat annoncé de Bix.com (site de concours d'amateurs) ou encore un accord avec 150 quotidiens américains destiné à regrouper les petites annonces et permettre d'adresser des publicités ciblées aux lecteurs.