BERLIN (AFP) - L'Allemagne est passée tout près d'un drame en déjouant de justesse un projet de massacre de deux lycéens, dont l'un s'est suicidé, moins de deux semaines après une tuerie dans un lycée de Finlande soldée par neuf morts.
Le massacre était programmé pour mardi. La police de Cologne (ouest) a interpellé dimanche un jeune de 18 ans qui a reconnu avoir concocté ce projet avec un camarade de lycée. Ce dernier, âgé de 17 ans, s'est suicidé en se jetant sous un tramway, juste après avoir été interrogé par la police.
La tuerie devait avoir lieu un an exactement après une fusillade qui avait fait 37 blessés dans un collège de la région, à Emsdetten. Un ancien élève dépressif et lourdement armé avait alors pris d'assaut l'établissement. Il avait tiré au hasard puis s'était suicidé.
Les deux lycéens de Cologne avaient établi une liste de 17 professeurs et élèves qu'ils voulaient visiblement éliminer, pour des motifs encore inconnus, selon la police. Ils comptaient ensuite se donner la mort.
Ce sont des élèves et la direction du lycée qui ont alerté la police vendredi de la présence sur le site internet d'un des suspects de cinq photos du massacre du lycée Columbine à Littleton, dans le Colorado (Etats-Unis, 13 morts en 1999).
Les policiers ont convoqué le lycéen, puis l'ont laissé partir parce qu'il avait "promis" de retirer les photos de son site et assurait avoir seulement voulu appeler à la vigilance. Le jeune s'est suicidé dans la foulée vendredi.
Son camarade de 18 ans était en garde en vue lundi.
Au domicile des deux suspects, les enquêteurs ont saisi des armes, dont des pistolets à air comprimé et deux arbalètes. Les deux amis fabriquaient en outre des cocktails molotov et s'étaient documentés sur la conception de bombes.
En novembre 2006, quatre jours seulement après la fusillade d'Emsdetten, la police de Berlin avait déjà déjoué un projet de tuerie dans un lycée. Le suspect avait là aussi listé ses futures victimes, et ceux qu'il pensait épargner.
Le mois dernier, c'est la police de New York qui déjouait le projet d'un collégien, lui aussi inspiré par le massacre de Columbine.
L'Allemagne est particulièrement en alerte, encore traumatisée par un drame survenu en avril 2002 à Erfurt, en ex-RDA: un jeune de 19 ans avait alors tué 16 personnes dans son ancien lycée, avant de se suicider. Une tragédie sans précédent en Allemagne.
Jeudi, une école de Mayence (sud-ouest) avait été évacuée après l'annonce d'un massacre sur internet.
Depuis la tuerie d'Erfurt, la violence à l'école et l'accès aux armes occupent une grande place dans le débat public.
L'un des deux principaux syndicats de police allemands (DPolG) réclame la création d'un registre européen des armes. Selon lui, 10 millions d'armes circulent légalement en Allemagne mais le nombre d'armes illégales est deux fois plus élevé.
Plusieurs experts ont appelé lundi à la vigilance, encourageant élèves, parents et enseignants à signaler toute déclaration d'intention à caractère violent.
Un spécialiste de la prévention, Frank Robertz, a lui accusé les écoles de se mettre trop souvent "la tête dans le sable", refusant de prendre au sérieux les signaux précurseurs.
Les tueries sont "souvent" annoncées en amont par leurs auteurs, qui "choisissent volontiers des dates symboliques", a relevé Rudolf Egg, directeur de l'institut central de criminologie à Wiesbaden (ouest), selon qui les lycéens concernés n'ont pas forcément de passé violent.
D'après la police de Cologne, le jeune suicidé était "discret" mais son camarade avait des "problèmes" scolaires et familiaux. Les délégués du lycée ont exigé un renforcement de l'encadrement des élèves par des psychologues. Lundi, l'établissement est resté fermé.